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L’oued de mon enfance et de mes souvenirs en Algérie

L'oued de mon enfance et de mes souvenirs en Algérie

L’oued d’un temps passé mais si proche encore

L’oued magique. C’était en Algérie, à l’ouest du pays, tout proche du Maroc, plus précisément d’Oujda, ville marocaine frontalière. Je n’étais encore qu’un enfant. Je me souviens, comme si c’était hier, d’un endroit où je passais des heures entières. Un coin perdu, à l’abri du temps, un refuge que je fréquentais assidument. Il y avait, dans cet emplacement, un oued dont les eaux s’écoulaient lentement et m’accueillaient aux sons de leurs doux clapotis. Dans cet oued magique, je me baignais, lavais mon linge, au milieu des grenouilles, des lézards, des tortues ; tous s’étaient habitués à ma présence. Un lieu unique, majestueux. Pour y parvenir, je devais passer par une vallée rocailleuse, abrupte, accidentée et franchir de hauts et imposants rochers grisâtres, ainsi que des roches sédimentaires, dont certaines étaient blanches, d’autres anthracites.

Chaque fois que je m’y rendais, je ressentais la paix, la quiétude, une grande fraîcheur due à l’humidité de l’eau, mais aussi à un vent léger et caressant la peau. Je n’étais plus sur terre, mais ailleurs. Mon âme pénétrait dans un lieu où tout était calme, reposant et hors du temps. En cet été très chaud, l’eau de l’oued était limpide, fraîche, glissant paisiblement en suivant le cours de son lit. Du haut d’un rocher, je plongeais, acrobatiquement, dans une grande retenue d’eau. Je nageais et jouais durant des heures, sans jamais ressentir aucune fatigue.

Je me souviens de l’odeur particulière du savon utilisé pour laver le linge. Un savon traditionnel confectionné à base d’huile d’olive pour l’essentiel. Mes vêtements s’imprégnaient de cette odeur naturelle, sentaient bon l’Algérie. Une fois le linge lavé et rincé, je l’étendais sur des roches en plein soleil. Quelques minutes suffisaient pour le sécher.

L’oued était également un idéal lieu de rencontre pour les femmes du village. Mère y venait avec des voisines pour laver le linge, mais aussi pour discuter entre elles. Cet oued offrait un moment de partage, de convivialité et d’écoute entre mères.

Malheureusement, en seulement quelques décennies, l’oued a perdu de sa magie, de ses fééries. La sécheresse a réduit le débit d’eau et la végétation a entièrement disparu. La pollution sauvage a dégradé la qualité de l’eau. Aujourd’hui, il subsiste un écoulement d’eau d’un niveau si faible que l’on n’entend plus les clapotis d’autrefois, et il est désormais impossible d’y laver son linge. J’entends encore la voix de mère frappant à l’aide d’un battoir à linge les vêtements et éprise d’un fou rire furieux.

Mais les souvenirs d’enfance, que j’ai conservés de ce mystérieux oued, restent gravés dans ma mémoire. Ils sont indélébiles. Je ne nage plus dedans depuis fort longtemps, mais quand il m’arrive encore de m’y égarer parfois, à la sauvette, alors j’entends toujours les vols furtifs des perdrix venues se désaltérer, fuyant au moindre bruit, et les puissants coassements des grenouilles et des crapauds.

Et ce n’est qu’à la tombée de la nuit que je repars, laissant derrière moi un endroit qui fut un paradis que nos parents et nous-mêmes protégions mais que les nouvelles générations n’ont pas su préserver comme nous sûmes le faire par devoir envers nos enfants.

La contraction du temps est perceptible lorsque vous visitez, après des années, un endroit où vous avez passé une majeure partie de votre enfance, et que vous ne ressentez plus ce lieu comme lorsque vous étiez enfant ; vous avez l’impression que cet emplacement s’est rétréci au fil du temps, à l’échelle des années passées.

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