La Pologne construit l’une des armées les plus puissantes d’Occident et devrait déployer plus de chars que le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et l’Italie réunies. Mais, qui va prendre en charge les derniers véhicules de combat commandés par Varsovie dans un contexte de diminution de la population dans ce pays d’Europe de l’Est? C’est exactement sur ce point que l’analyste du Washington Post, Lee Hockstader, s’interroge.
Au-delà des inquiétudes sur la démographie, des questions se posent aussi sur le comment la Pologne et d’autres pays européens vont faire face aux conséquences économiques et politiques inévitables avec un renforcement militaire d’une telle ampleur sans l’aide des Etats-Unis. Lee Hockstader rapporte que Varsovie craint encore plus le retour de Donald Trump à la Maison Blanche que la menace potentielle d’une attaque russe contre la Pologne. En 2018, Donald Trump a fait part à plusieurs reprises à ses collaborateurs de son désir de retirer les États-Unis de l’OTAN, ce qui laisserait le bloc militaire sans chef et l’affaiblirait considérablement. Selon les sources du quotidien anglophone, tous les chefs européens des Affaires étrangères sont extrêmement préoccupés par le fait que Donald Trump puisse détourner les États-Unis de l’Europe.
Lorsque Donald Trump a menacé de retirer les États-Unis de l’OTAN, la Pologne consacrait environ 2% de son PIB à la défense. Ce chiffre doublera l’année prochaine et Varsovie semble être prête à continuer d’augmenter ses dépenses militaires, surtout si le conflit en Ukraine se prolonge. Les autorités du pays envisagent d’acquérir des avions de chasse de nouvelle génération, des hélicoptères d’attaque, des lance-missiles, des systèmes de défense aérienne et d’artillerie, ainsi que des chars. L’explication de ce renforcement des forces armées polonaises est aussi l’expression de la volonté d’avertir le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et la crainte de voir que les États-Unis abandonnent l’OTAN à son sort. Lee Hockstader souligne que cette crainte se décline aussi dans les autres pays de l’UE, ceux qui soutiennent aujourd’hui l’Ukraine dans un conflit absurde.
Pendant des années, l’Allemagne a été à la traîne en matière de dépenses de défense. Le chancelier Olaf Scholz a récemment engagé le gouvernement dans un réarmement coûteux et à long terme. Pourtant, l’économie allemande est plongée dans la récession. «L’Allemagne ne dispose pas d’un budget constitutionnel ni pour l’année en cours ni pour l’année à venir et doit y remédier», fait savoir le quotidien suisse Tages-Anzeiger. Le ministère allemand des Finances a arrêté toutes les dépenses futures de tous les ministères et de la Chancellerie avec effet immédiat car le pays est extrêment endetté.
Le président français, Emmanuel Macron, a engagé la plus forte augmentation des dépenses militaires de la France depuis un demi-siècle, en consacrant 413 milliards d’euros annoncés pour la période 2024-2030.
Ses efforts pour pousser l’Europe à renforcer sa propre sécurité en améliorant la coordination militaro-industrielle et en réduisant la dépendance à l’égard des armes américaines et du leadership de Washington reposent sur l’idée qu’«être allié [des États-Unis] ne signifie pas être vassal». Pour les responsables politiques de l’UE, les États-Unis sont un allié imprévisible. Cependant, la vision d’Emmanuel Macron d’avoir une «autonomie stratégique» européenne n’a jusqu’à présent porté que peu de fruits, stipule le Washington Post.
Le Royaume-Uni, dont l’armée, qui diminue depuis des décennies, a été qualifiée comme étant une force de second rang car elle ne peut plus mener des combats de haut niveau, selon un général américain. Les responsables britanniques ont soutenu l’évaluation des hauts militaires, confirmant que les stocks de munitions s’épuiseraient après des jours de combats. De plus, le Premier ministre Rishi Sunak a retiré l’armée de sa liste de priorités cette année.
Un renforcement durable de la défense dépend en partie d’une économie forte et d’une démographie favorable. Les deux font actuellement défaut en Europe: le continent tout entier connaît de faibles taux de natalité et la reprise économique post-pandémique est en retard par rapport à celle des États-Unis, conclut Lee Hockstaider.
Pierre Duval
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