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Etes-vous Français ? Je ne comprends pas cette question – INFOSPLUS

Êtes-vous vraiment Français ?

« Je lis dans certains regards cette interrogation pressante : êtes-vous vraiment Français ? Et honnêtement, je ne comprends pas bien le sens de cette question. »

Français ? Insidieusement, toujours la même question qui fâche

Etes-vous vraiment Français ? Cette question impertinente n’est pas adressée à tout le monde ; elle est spécialement destinée aux enfants d’immigrés, notamment aux Noirs, aux Maghrébins, aux Asiatiques, entre autres. Et très franchement, je n’en comprends pas le sens. Elle a comme quelque chose de suspect, d’insultant, de méprisant. Comment peut-on demander à des enfants nés en France, s’ils se sentent Français ? Il y aurait donc, dans ce pays, à travers cette insinuation, de vrais et de faux Français. Cela rappelle étrangement une période passée où il ne faisait pas bon être résistant ou avoir un nom à consonance juive. Les anciens se souviennent sans doute de cette douloureuse période de l’histoire française. C’était hier, encore. 

L’identité Française serait-elle en péril ?

A travers cette question pernicieuse, impudente, c’est le sempiternel problème de l’identité française que l’on veut remettre sur la table. Cette identité serait-elle en péril ? Existe-t-il un portrait type du Français ? Remettez-moi un exemplaire de ce formulaire et je vous dirai si je corresponds au profil. Mais vous n’oserez pas, au nom de la liberté et des principes moraux, si durement conquis et instaurés en France, vous permettre une telle effronterie, un tel reniement des principes fondamentaux répréhensible et contraire à la loi, à la dignité humaine, à la charte universelle des Droits de l’Homme. Et pour contourner sournoisement l’excellence de ces valeurs morales — qui fâchent aujourd’hui tant d’intellectuels, d’hommes politiques, comme si l’autoritarisme et le fascisme, hier viscéralement combattus, leur manquaient cruellement, à eux, nouveaux réactionnaires bien-pensants des salons parisiens — vous voudriez tout bonnement ranger les êtres humains en fonction de leurs origines ethniques ; j’évoque, bien sûr, le communautarisme. Ainsi, chaque individu serait cloisonné dans une catégorie à vie, avec l’interdiction formelle d’en sortir.

Mais croyez-moi, vous qui prétendez que les Grands Hommes qui ont fait l’histoire française me sont étrangers, parce que je serais d’une autre culture, d’une autre civilisation, vous vous méprenez. Car en vérité, je reconnais leurs talents immenses, mais en plus je les respecte pour les combats qu’ils ont menés et pour tout ce qu’ils ont apporté à la fois à la France et à l’humanité. Je puis même vous assurer que vous avez tort d’entraîner la France sur un chemin autre que celui que ces illustres personnalités vous ont indiqué. Ils avaient eu raison de briser les chaînes de la servitude et de l’asservissement. A l’inverse, vous caressez secrètement le rêve de réintroduire ces horribles chaînes de la honte.

Mais prenez garde 

J’aimerais pourtant vous mettre en garde contre l’expérience de la vie, celle qui a prouvé que c’est toujours le mieux intégré à un système qui finit, un jour ou l’autre, par se révolter. Et pourquoi ? La raison est assez simple ; j’allais presque dire, elle est le reflet, l’image de la nature humaine. J’en veux pour preuve mon parcours professionnel personnel. Au fur et à mesure que j’ai gravi les échelons hiérarchiques, parce que je m’efforçais d’être le meilleur : ma seule réponse face aux intolérants, et Dieu sait si j’étais plutôt bien intégré, il s’est toujours trouvé, inévitablement, sur mon parcours, de parfaits imbéciles, des sots de toute espèce pour me rappeler mes origines, ma culture, ma religion et la couleur de ma peau. Sentiments que je partageais avec des collègues de confession juive. Ces sinistrés de la vie me rappelaient, dans le cas où je l’aurais oublié en route, que je n’étais à leurs yeux qu’un étranger. Excédé, offensé, alors que j’étais un homme sans histoire, j’ai fini par me mettre en colère. En guise de réponse, j’ai clamé haut et fort mes convictions, mes racines, non pour les utiliser comme arme d’une rébellion quelconque, mais par fierté, par solidarité avec ma propre conscience et ma descendance. En fait, je crois que j’ai eu, toute proportion gardée, la même réaction épidermique qu’avaient eue de leur temps Martin Luther King et Gandhi. Deux éminentes personnalités qui ont su imposer leurs idées et leurs idéaux par la non-violence.

Alors, je suis, comme ceux de ma génération, français par la langue, la culture et la cuisine, et je sais maintenant pertinemment que vous êtes les garants de ma deuxième culture, puisque vous ne raterez pas une seule occasion de me rebattre les oreilles, sans cesse à me renvoyer à mes origines dont je suis, entendez-le bien, d’une fierté sans nom. Finalement, les sots, les imbéciles, évoqués plus haut, m’ont rendu un fier service. Sans eux, j’aurais pu perdre une grande partie de mes précieux trésors, un peu de moi-même.

Déracinez un arbre et vous n’aurez plus qu’a l’abattre car il mourra 

C’est une gravissime erreur de demander à des enfants, venant de milieux socioculturels différents, nés en France, de vivre dans la société française tout en les priant de laisser au vestiaire leur culture d’origine, leur histoire, leur religion, voire leur langue maternelle. Car tôt ou tard, ces enfants éprouveront le besoin de revenir à leurs racines. Exactement comme lorsque chacun d’entre nous éprouve un besoin irrésistible de revoir des visages, un endroit, une maison, des routes, un puits, de se replonger dans son passé, parce que les souvenirs et la mémoire ont cette éternelle envie qu’on les maintienne en éveil. C’est une réaction humaine ; on n’y peut rien, c’est ainsi. Imaginez le risque pour ces enfants de s’enflammer pour leurs racines recouvrées, découvrant qu’on aurait injustement tenté de les couper de leurs racines. Ils pourraient éprouver des ressentiments, de la colère. Pour éviter ces frustrations, il ne faut pas les priver de leur identité propre qui fait leur fierté, leur dignité. Quant à la langue et la culture françaises, qu’ils acquerront forcément, celles-ci viendront couronner leur personnalité pour en faire de futurs ambassadeurs de la France dans le monde entier. C’est celui-là le vrai visage de la France !

Unité nationale et droit à la différence

Inutile de revenir sur ces tristes inepties du « Karcher » et de la « racaille » ayant tristement rendu célèbre un homme politique, mais je veux juste rappeler les blessures qu’elles ont suscitées chez de nombreuses personnes. Ce que vous ne voudriez pas que l’on fasse à vos enfants, d’autres, habitant les banlieues, n’ont pas admis non plus qu’on traite tous leurs enfants de délinquants et de voyous. Nous sommes dans un pays de droit. La délinquance est punie par la loi. Arrêtez ces délinquants récidivistes, faites-les juger, et personne ne contestera la sentence. Nul n’est besoin de stigmatiser une population déjà fragilisée socialement et économiquement.

La nationalité française aura une signification symbolique plus nette dans mon esprit, lorsque tous ces mômes seront enfin fiers d’être des Français et d’appartenir à une communauté non plus qu’en théorie, mais également en pratique. Je sais que les routes seront encore longues et difficiles, probablement semées d’embûches, que les d’écueils ne manqueront pas, mais rien n’est insurmontable quand on a foi en ses idéaux, foi en ses convictions. Donnez-leur cette chance de croire en un avenir meilleur, en une société plus juste et plus fraternelle. Peut-être alors, tous ces gosses des banlieues se serviraient-ils de leur deuxième culture comme d’une seconde chance pour la France, celle qui concilierait unité nationale et droit à la différence.  

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