Votre analyse, monsieur l’ambassadeur, ne reflète pas la réalité
En effet, monsieur Gérard Araud, ce qui freine la normalisation entre l’Arabie et Israël, c’est la population saoudienne et beaucoup de Oulémas saoudiens. L’opinion arabe, celle de la rue en général, joue également beaucoup. Les Musulmans sont viscéralement attachés à leur religion.
L’Arabie Saoudite est le lieu où se trouvent la KAABA et MEDINE. Je pense que cela ne vous a pas échappé.
Le prince d’Arabie Mohammed ben Salmane a d’ailleurs affirmé et insisté sur le fait qu’il mettait une condition sine qua non à une reconnaissance d’un Etat Palestinien par Israël à toute éventuelle normalisation avec l’Etat sioniste. On ne peut être plus clair. Et c’est bien parce qu’il sait que les Musulmans du monde entier l’observent et s’inquiètent d’une telle décision dans les circonstances actuelles qu’il prend beaucoup de précautions.
Interrogez-vous. Israël est en mesure aujourd’hui de normaliser avec tous les pays arabes et musulmans, mais à une condition. Qu’il reconnaisse un Etat palestinien libre et souverain. Pourquoi ne le fait-il pas ? Parce que son objectif, qui est celui des sionistes, affiché dès le départ, est de prendre possession de toute la Palestine. C’est cela la vraie raison. Israël n’a que faire de la paix.
Ce que nous voyons actuellement, et je déplore personnellement les morts civils des deux côtés — la vengeance de Netanyahou qui ordonne un véritable massacre dans la bande de Gaza est pire que l’attaque du Hamas — est le fruit d’une politique agressive, colonialiste, raciste, belliciste et arrogante des pouvoirs publics israéliens. Je pense que vous ne l’ignorez pas non plus. Quel peuple peut accepter les exactions commises par Tsahal ainsi que les opérations « coup de poing » conduites par des colons fous fanatiques et illuminés ? Le pouvoir israélien laisse faire sans réagir. Preuve évidente de son intention d’expulser les Palestiniens de Palestine.
On ne peut pas affirmer que M. Benjamin Netanyahou est un homme de paix, ou qu’il ait fait quoi que ce soit pour calmer la situation. Il n’a jamais cessé de provoquer et de jeter de l’huile sur le feu. Il s’est d’ailleurs souvent targué d’avoir « dynamité les accords d’Oslo ». Son arrogance, son mépris pour l’islam et les musulmans (la mosquée Al-Aqsa est profanée tous les jours et jamais il n’a condamné ces actes ignobles), et ses rapprochements avec l’extrême-droite fanatique israélienne (qui jure d’exterminer les Arabes !) expliquent ce que nous vivons aujourd’hui.
Votre position, monsieur Gérard Araud, est pro-israélienne, c’est votre droit, mais ne nous prenez pas pour des imbéciles et faites preuve de plus d’impartialité si vous voulez être crédible.
La voix de la France devrait être moins partisane, plus nuancée et mesurée, car le président Macron semble avoir clairement choisi son camp. Ce qui pose problème à l’International. La diplomatie française démontre une fois de plus ses immixtions hasardeuses dans des dossiers explosifs.
On peut, bien entendu, condamner les attaques du Hamas, mais il eût fallu condamner également toutes les attaques et les violations du droit international par Israël qui, rappelons-le, n’a jamais respecté aucune des nombreuses résolutions votées à son encontre au Conseil de Sécurité. Les USA bloquent systématiquement par leur droit de veto toute tentative de sanction. Est-ce normal ?
Nous n’avons jamais entendu le Président Macron insister sur les violations systématiques d’Israël, en termes de droit international.
Le monde arabe est complexe, divisé et parfois imprévisible. J’ai la prétention de le connaître un peu mieux que vous. Mais s’en prendre à l’islam, au Prophète, aux valeurs islamiques sacrées, les Musulmans ne sont, dans ces conditions, ni des lâches, ni des infidèles, ils répondront toujours pour défendre leur honneur et leur dignité.
Je sais bien, monsieur Gérard Araud, que vous tentez de nous faire croire qu’il existe un camp du Bien, celui d’Israël, opposé au camp du Mal, celui des palestiniens, mais sachez que cela ne prend plus. Nous avons changé de monde ; aujourd’hui, les gens sont informés par différentes et multiples sources d’information.
Et ne nous faites pas l’affront de nous lancer à la figure ce que l’ancien président américain G. W. Bush avait lancé au monde, au-lendemin des attentats du 11 septembre : « Vous êtes avec nous ou contre nous. » Le monde de la diplomatie ne se résume pas ainsi. Et il est dommage que vous ayez des raccourcis qui ne visent en réalité qu’à défendre Israël.
